STMG : Les jeux vidéo sont-ils un art ?

Les jeux vidéo sont-ils de l'art exclusivement s'ils ressemblent à l'art classique ?


    Il faut d'abord analyser la question.


Méthodo rapide part. I


Une question est une demande pour obtenir une information. Elle ne présuppose pas de réponses précises.

Un problème est une hésitation entre au moins deux réponses possibles.

En philosophie nous transformons des questions en problèmes.


Toute question repose sur des affirmations implicites. « Où est mon chat ? » Suppose que j’ai un chat, qu’une créature vivante puisse être un objet de propriété, que ce chat n’est pas un chat imaginaire, etc.

Si nous pouvons examiner de façon critique tous ces présupposés, ces hypothèses (une hypothèse est une solution possible), pour montrer qu’ils sont justes ou non, alors nous pouvons commencer une réflexion philosophique. 


Organiser l’examen de ces hypothèses est le propre d’une dissertation. La dissertation commence par examiner les hypothèses les plus simples, pour montrer en quoi elles sont insuffisantes, et elle finit par examiner l’hypothèse la plus complexe.

La dernière hypothèse sera la plus vraie. Nous procédons un peu comme Sherlock Holmes : « lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il est nécessairement la vérité. »

Notre réponse sera donc progressive et critique : elle va se corriger au fur et à mesure pour faire apparaître ce qui est le plus vraisemblable.


Ici la question « Les jeux vidéo sont-ils un art ? » implique des présupposés : 

(1) je sais ce que sont les jeux vidéo, 

(2) je sais ce qu’est l’art, 

(3) je peux faire entrer ou non les jeux vidéo dans la catégorie art ou non, en tout cas, cette catégorie est fixée. 



Méthodo rapide part. II.


Les deux premiers présupposés exige un travail de définition : jeu vidéo et art.

On va commencer par le plus simple : l’art.

On pourrait dire que (1) « l’art est ce qui est beau. » Mais il y a des choses belles qui sont naturelles… art vient de « ars » en latin qui signifie habilité, technique, composition. Ce sont des activités humaines.

Il faut donc mettre les beautés naturelles hors du champ de l’art.

L’art est (2) « l’ensemble des choses belles produites par l’humain. » 

Mais l’art plaît-il nécessairement à tout le monde ? Non. Sommes-nous coincés… obligé de reconnaître que tout est art ? Non plus. Car on peut arranger ça en définissant l’art par son objectif. Donc (3) l’art est « l’activité humaine qui vise à produire des choses belles. » 

Dernier problème : il y a des choses belles parmi des objets qu’on peine à nommer artistiques. Ces objets sont bien produits de la main de l’homme. De belles voitures, de belles chaussures etc. Mais quelle différence existe-t-il avec un tableau ? Ces objets sont utiles, même s’ils sont beaux à notre goût. Ils ont un objectif qui n’est pas d’abord la beauté. Une belle voiture pourrait ne pas rouler et avoir une belle carrosserie. 

Donc l’art est (4) l’art est « l’activité humaine qui vise à produire de belles choses pour elles-mêmes » c’est-à-dire sans leur donner d’autres finalités à remplir (aller vite, marcher, etc.).

Comprendre ce qu’est une chose est comprendre pourquoi elle n’est pas autre chose.


On définit à la fois négativement, en disant ce que ça n’est pas. Mais on peut aussi s’aider d’une idée-type, un archétype, qui est emblématique pour tester notre définition. 


Pour le jeu vidéo : 

  1. C’est un jeu avec de la vidéo. Oui mais, regarder un jeu à la télévision…?
  2. C’est un jeu avec de la vidéo avec laquelle on interagit. Oui mais alors Windows 95 est un jeu vidéo…?
  3. C’est un jeu avec de la vidéo avec laquelle on interagit pour se distraire. Oui mais alors, c’est une définition circulaire : on se distrait parce qu’on joue, et on joue parce qu’on se distrait. Il faut donc préciser ce qu’il y a de distrayant dans le jeu vidéo spécifiquement.
  4. Ce sont des jeux qu’on connaît déjà qui peuvent être adaptées, comme les échecs ou les dames. Oui mais ce ne sont pas des jeux vidéo qui apparaissent avec la console. Ils existaient avant.
  5. Les jeux vidéo inventent des jeux où on joue en temps réel, qui sollicite nos réflexes, qui demande une certaine habilité ? Non, ce n’est pas suffisant, il existe des jeux au tour par tour, comme Civilization.

Conclusion : il existe différentes formes de jeux vidéo. Mais ce sont tous au minimum : une interaction avec un programme (des règles et un objectif), qui exige de l’habilité ou d’évoluer dans un monde. Ces interactions produisent des expériences ludiques différentes avec une machine. 



Après avoir analysé le sujet, on peut se servir des présupposés contenus dans le sujet pour organiser notre réponse. Car on sait qu’il existe trois réponses possibles : 

(1) Les jeux vidéo correspondent à la définition de l’art. Et pourquoi ? Parce que nous avons une définition de l’art qui permet de les inclure, si nous entendons par art le produit d’une activité humaine visant à fabriquer de belles choses.

(2) Mais quelque chose dans la définition du jeu vidéo fait obstacle à qualifier les jeux vidéo d’art, peut-être parce qu’ils visent une certaine utilité. Par conséquent, les jeux vidéo risquent d’être en dehors de notre définition de l’art.  

(3) Mais on est parti du principe que l’art avait une définition fixe, mais cette définition évolue. La question est de savoir s’il faut ou non faire évoluer cette définition pour que les jeux vidéo y rentrent.


Voilà notre problème bien posé : les jeux vidéo peuvent-ils entrer dans une définition préexistante de l’art, ou alors sont-ils condamnés à n’être que des jouets ? Ou bien nous pouvons  dépasser cette opposition et nous demander si les jeux vidéo ne sont pas en train de changer la définition même que nous avons de l’art. 

Notre plan est donc le suivant. Nous verrons d’abord que les jeux vidéo ont des caractéristiques qui correspondent aux objets ou activités artistiques. Puis nous devrons admettre qu’il existe des caractéristiques inhérentes aux jeux vidéo qui interdisent sa qualification d’art. Enfin, nous montrerons que l’art est susceptible d’être plus qu’une production de beaux objets, mais aussi une façon de représenter notre monde actuelle avec des moyens nouveaux. 



I. LES JEUX VIDEO REMPLISSENT LES MEMES FONCTIONS QUE L'ART.

1. « L’art doit avant tout embellir la vie »

    Partons d'une idée simple : l'art consiste à faire de belles choses. Nietzsche ne semble pas dire autre chose lorsqu'il parle d'embellir la vie.
    Pourtant, il y a ce qu'on croit que le texte va nous dire et ce qu'il dit vraiment !

« L’art doit avant tout embellir la vie, donc nous rendre nous-mêmes tolérables aux autres et agréables si possible : ayant cette tâche en vue, il modère et nous tient bride, crée des formes de civilité, lie ceux dont l’éducation n’est pas faite à des lois de convenance, de propreté, de politesse, leur apprend à parler et à se taire au bon moment. »


    On pense que le beau est ce qui harmonieux, qu'il représente la perfection sensible… Mais non ! Selon Nietzsche, le beau est d’abord ce qui est arraché à la laideur !

    Nietzsche aime rappeler ailleurs à quel point la vie a un caractère tragique. Nous sommes soumis à un devenir, une multiplicité d’épreuves contradictoires, qui ne peuvent jamais se résorber parfaitement dans un idéal de bonheur ou un projet fût-il politique, moral, esthétique. La vie est difficile, il faut l’embellir. Citation connue de Nietzsche qui condense également cette intuition : « sans la musique, la vie serait une erreur. »


    On pense également que le beau est l'expression d'une créativité individuelle, d'un génie. Mais Nietzsche dit au contraire que le beau relève de la société et de l'éducation.   

    Nietzsche explique que retenir la laideur ne demande pas de se laisser aller... au contraire, il faut se contraindre, se discipliner. Tous les artistes doivent se soumettre à une discipline. Flaubert avait une pièce qu'il appelait un gueuloir pour crier ses textes après avoir travaillé sept heures par jour. Glenn Gould jouait du piano en laissant l'aspirateur branché pour ne sentir que le geste de ses doigts et la musique intérieure supposée l'accompagner. Chaque artiste invente sa propre discipline, sa propre façon d'être sûr que ce qu'il fait est bon. Même Andy Warhol, très bon dessinateur pourtant, a choisi une technique de reproduction des images (la reprographie) qui pourrait n'être qu'une façon paresseuse de faire des tableaux. Mais pour être sûr qu'il choisissait la bonne image à répéter, il montrait ses choix à ses amis, et leur demandait très souvent leur avis, comme pour une véritable étude de marché.


« De plus, l’art doit dissimuler ou réinterpréter tout ce qui est laid, ces choses pénibles, épouvantables et dégoûtantes qui malgré tous les efforts, à cause des origines de la nature humaine, viendront toujours de nouveau à la surface : il doit agir ainsi surtout pour ce qui est des passions, des douleurs de l’âme et des craintes, et faire transparaître, dans la laideur inévitable ou insurmontable, son côté significatif. »

    L'art peut paraître simple et se résumer à une formule... Mais là encore, le texte est plus subtil : il y a deux principes presque contraires. D'une part (a) il faut dissimuler la laideur, cacher ce qui est épouvantable et qui revient toujours. Et d'autre part (b) il faut accepter cette laideur mais montrer à travers elle « son côté significatif ». 
    Nous sommes donc situés entre deux contraires : ne pas accepter la laideur et l'accepter en même temps. Mais le point commun dans les deux cas est qu’on ne peut rien montrer de réel, de cru, mais seulement représentation humaines, artificielles. On ne peut pas naïvement dire que l’art représente le réel. Il faut toujours mettre une distance avec le réel. 

a) si on dissimule la laideur, cela signifie qu’on idéalise ce qu’on connaît. On le lisse, on le renvoie à une version « rêvée », plus ordonnée, plus propre. C’est la tendance apollinienne de l’art, comme le dieu Apollon qui incarne la beauté, le rêve et la vérité. 

b) si on interprète la laideur, cela signifie qu’on l’accepte en partie. Ici laideur veut dire désordre, ce qui nous résiste, ce qui résiste à nos attentes et nos catégories bien connues. C’est la tendance dionysiaque de l’art comme le dieu Dionysos qui incarne l’ivresse et l’extase. Mais se rapprocher brutalement du réel ne produit rien, on serait placé devant un réel dénué de sens, absurde. Or, pour Nietzsche ce mode de création suppose au contraire qu’on donne du sens à ce réel contrariant. Pour accepter les choses douloureuses, il faut leur donner un sens. Le présupposé implicite ici est « rien de plus douloureux qu’une douleur absurde ». Il faut donc habiller la douleur de motifs, d'histoires. 

Un bon exemple est la forme tragique du théâtre : même si on fait manger ses enfants à un père, (la tragédie des Atrides racontée dans l’Orestie d’Eschyle) ou qu’on tue à tour de bras et qu’une belle-mère aime son beau-fils (Phèdre)… le côté significatif est résumé dans l’idée tragique par excellence qu’on est seulement le jouet des dieux et du destin.

Il faut trouver un sens qui représente quelque chose, une valeur. Exemple classique : la douleur du héros signifie son courage, et le mort du méchant montre à quel point il est infâme. Les accidents sont toujours une épreuve, elles sont des rebondissement où le héros va montrer qu’il est doué de tel ou tel qualité. Bref, chaque histoire, chaque peinture doit acquérir une dimension morale. Plus généralement ici il est question de changer « la boue en or » (Baudelaire), c’est-à-dire de styliser ce qui est sinon sans intérêt. 


« Après cette tâche de l’art, dont la grandeur va jusqu’à l’énormité, l’art que l’on appelle véritable, l’art des œuvres d’art n’est qu’accessoire. L’homme qui sent en lui un excédent de ses forces qui embellissent, cachent, transforment, finira par chercher à s’alléger de cet excédent par l’œuvre d’art ; dans certaines circonstances, c’est tout un peuple qui agira ainsi. »


    Encore une surprise. On croit que Nietzsche va faire l'éloge de l'oeuvre d'art. Mais l'art des oeuvres d'art n'est que secondaire par rapport à ce premier élan vers l'art, au sens qu'on peut donner aux tragédies, aux passions, à ce qu'on subit de pire. 

    L'art n'est pas un effort, mais c'est une nécessité vitale pour l'artiste. « Cherchez le besoin qui vous fait écrire, examinez s’il pousse ses racines au plus profond de votre cœur. » Rilke, Lettre à un jeune poète. Selon Rilke si vous pouvez vivre sans faire de l'art, n'en faites pas. Ne faites de l'art que si vous mourriez de ne pas en faire. 


« Mais on a l’habitude, aujourd’hui, de commencer l’art par la fin ; on se suspend à sa queue, avec l’idée que l’art des œuvres d’art est le principal et que c’est en partant de cet art que la vie doit être améliorée et transformée. Fous que nous sommes ! Si nous commençons le repas par le dessert, goûtant à un plat sucré après l’autre, quoi d’étonnant si nous nous gâtons l’estomac et même l’appétit pour le bon festin, fortifiant et nourrissant, à quoi l’art nous convie ? »


    On pense donc qu'il faut regarder les choses les plus belles d'abord, puis regarder la vie comme une copie dégradée de l'art. Mais c'est exactement l'inverse qu'il faut faire. Il faut apprécier la vie, car elle est la source vitale de l'art. L'art n'est qu'une façon d'exprimer la vie

    Par conséquent l'art n'a pas pour fonction de remplacer la vie (c'est ce qu'on appelle l'escapisme aujourd'hui : la volonté de s'échapper de la vie). Mais « l'art doit rendre la vie plus intéressante que l'art. » Cette phrase de l'artiste Robert Filliou exprime ce que Nietzsche explique : l'art n'est qu'une façon de se reconnecter à la vie. On ne peut pas sacrifier la vie pour une version soi-disant plus belle.

Exemple de commencement par la fin : les musées. On voit des œuvres totalement sorties d’un contexte, après sélection historique, alors que véritablement au départ une œuvre est le fruit d’un environnement, appelé à transfigurer quelque chose du réel. Peut-on comprendre les statues primitives si on n’a pas l’idée qu’elles sont autant de tentatives de prendre le contrôle sur des dieux, sur les forces de la vie, fécondité et mort ?


Pour juger d'une oeuvre d'art, Miyazaki se réfère à la vie, à ce que fait le fait d'être vivant. 
Sans quoi l'art n'aurait pour lui aucun sens.



    Qu’est-ce qui convient le mieux comme œuvres d’art pour Nietzsche ? Carmen, de Bizet. Ce qui convient le mieux à la définition de l’art selon Nietzsche ce sont toutes les formes ultra artificialisés d’art, mais qui garde une légèreté, une facilité qui passe pour de la vie. Et toujours capable de prendre en compte cet aspect tragique de la vie. 

    Alors peut-on dire que les jeux vidéo sont de l’art avec Nietzsche ? 

D’abord, c’est possible, puisque la définition de ce qui est art est large. Si vous créez un jeu vidéo parce que vous débordez de force vitale, ça en serait. Mais adopter ces critères psychologiques est assez peu efficace. Qui peut savoir ce qu’est cette énergie vitale ?

    Mais de façon plus fondamental, on retrouve dans les jeux vidéo un certain rapport à la dimension tragique de l’existence. Dans un Pacman, dans un Tetris, on joue et on est progressivement débordé par le chaos. Pourtant, ces jeux manquent peut-être d’une dimension profondément tragique : aucun n’écrit la fin par avance. On peut toujours gagner… plutôt que perdre. 

Néanmoins on peut répondre en insistant au contraire sur le fait qu’on perd souvent dans le jeu, encore et encore. Et qu’il y a bien une certaine tragédie dans la répétition de la mort (par exemple dans les jeux qui encourage le « try hard »).

En revanche, la dimension apollinienne des jeux vidéo est assez incontestable, puisqu’ils dissimulent par définition une certaine partie du réel pour le simuler, pour le rendre jouable. Les jeux vidéo sont beaux… et c’est pour ça qu’ils sont également mensongers.


2. L’art consiste à imiter le réel. 

La définition de l’art la plus simple consiste à dire qu’il est une production de beauté. Dans le monde antique, on parle donc de poïésis (production) et on range cette production du côté de la technique. Il n’y a pas de réelle différence entre les artisans et les artistes. Il faut dans les deux cas, posséder une certaine maîtrise, un savoir-faire.

    Mais la technique artiste consiste en quoi ? 

    La première fonction de l'art est celle de pouvoir représenter ce qui existe, afin d'en fixer l'image et la forme. Pensez bien que nous vivons à une époque qui est saturée d'images, alors que dans d'autres temps, le simple fait de voir ou de posséder des images était extrêmement rare.

    Lorsque l'art imite une apparence, on dit qu'il réalise une fonction mimétique (de mimésis, imitation).

Par conséquent l’une des conditions de tout art est de savoir réaliser cette ressemblance. Même si l'on pense actuellement que tout peut être de l’art, y compris ce qui ne ressemble à rien de connu, on comprend assez facilement l’intérêt de la fonction mimétique de l’art. Dans un monde où les images ne sont pas omniprésentes, les représentations permettent de se souvenir ou de faire connaître.

Le mythe concernant l’invention du dessin raconte que le potier Butadès a cerné le contour de l’amant de sa fille avant que celui ne part à la guerre, pour qu’elle garde en souvenir sa silhouette. 

L’autre légende est celle rapportée par Pline l’Ancien, qui oppose deux peintres, Zeuxis (qui peint des raisins qui trompent les oiseaux) et Parrhasius (qui peint un rideau supposé recouvrir le tableau qui trompe les humains). Les deux représentations sont parfaites, mais on juge la perfection de la représentation à… la faculté de tromper ! 

C’est là qu’intervient la critique de Platon.

Platon attaque Homère dans La République, de façon générale tous les arts figuratifs (et donc il épargne la musique). Sur un double motif : 

1) D’abord métaphysique. L’art nous éloigne du réel, de deux degrés. L’artiste ne représente pas l’idée de la chose, mais l’apparence de la chose. L’artiste ne peut pas nous permettre de connaître le réel, il ne nous permet pas non plus de connaître l'idée qui définit la chose. Si le peintre peint un lit, il saisit seulement l'apparence du lit. Il ne connaît pas le lit de l'artisan, il connaît encore moins ce qu'est l'idée du lit. L'artiste nous détourne en nous séduisant vers des représentations multiples de la chose.

2) Puis politique et morale. L’art trompe les masses ignorante. Si on ne connaît pas la réalité, on ne peut pas mesurer l'écart entre les histoires racontées et les faits historiques. Platon reproche à Homère de mal représenter le courage en faisant pleurer Achille à la mort de Patrocle. A notre époque, un film comme Inglorious Basterds montre Hitler assassiné dans un cinéma. Ceux qui ne connaissent pas l'histoire de la seconde guerre mondiale sauront-ils s'empêcher de croire en cette uchronie ?


    Peut-on dire que les jeux vidéo sont de l’art avec Platon ? 


    Les jeux vidéo ont toutes les qualités et les défauts de l’art de ce point de vue. Ils simulent parfaitement le réel. Et même, pas seulement les apparences, mais aussi la « physique » c’est-à-dire les lois mêmes qui gouvernent du réel. Ex : Angry Birds, qui ne fait que décrire des paraboles. Le premier jeu vidéo de l’histoire SpaceWar! (de 1962) simulait la gravité. 

Mais ils ont aussi les mêmes problèmes : ils peuvent mentir, tromper, et ce d’autant qu’ils sont plus réussis. Ainsi, Watchdogs 2 s’est vendu sur la promesse d’une ressemblance avec la ville de San Francisco (notamment avec un moteur de météo qui simulait la météo de la ville), mais se déplacer dans une ville, est-ce vraiment voler des voitures et pirater des portables ? Ou tous les Call of Duty qui présentent une image de la guerre séduisante et trépidante… Que penser de ces simulations lorsqu’elles sont présentées par l’armée américaine à un public jeune pour les enrôler ?

Néanmoins les créateurs de jeux vidéo ont donné la même réponse à cette critique platonicienne. Si les artistes s’éloignent du réel, alors il faut embrasser ce mensonge inhérent à l’art. Plus on s’éloigne du réel, plus on commence par créer. Par conséquent l’intérêt des jeux vidéo n’est pas de se limiter à être des simulateurs, mais au contraire à ouvrir l’exploration de mondes impossibles (générés aléatoirement) comme dans No Man’s Sky ou de mondes faciles à parcourir et synthétisant le mieux possible les différents usages que vous pouvez en faire (comme dans Zelda Breathe of the Wild).

Ainsi échapper au mimétisme peut paraître la meilleure façon de devenir véritablement un artiste. Les simulations de vol sont utilisées pour produire des simulations de vaisseaux spatiaux comme ceux de Star Wars (même s’il n’y a rien de scientifique dans la façon dont ils se déplacent). 


3. « L’art ne reproduit pas le visible mais rend visible. »

Au départ, il y a un problème : l’art est supposé être figuratif. 

        Mais on reconnaît que l'art dépend aussi de ce qui est le goût. L’art touche le public différemment (la beauté est dans l’oeil de celui qui contemple). Et il est donc possible que le public ne soit jamais en mesure de pleinement mesurer la vérité de la représentation artistique.

D’autre part, la figuration est extrêmement limitée. Il y a des objets imaginés (Goya, Fuseli préfèrent les monstres). Il y a aussi d’autres arts non figuratifs – la musique. 

Un artiste, Paul Klee, fait alors cette remarque : « il ne vient à l'idée de personne d'exiger d'un arbre qu'il forme ses branches sur le modèle de ses racines. »


    EXERCICE : en vous référant au texte de l’Esthétique de Hegel, répondez aux questions suivantes :


    « On peut dire d'une façon générale qu'en voulant rivaliser avec la nature par l'imitation, l'art restera toujours au-dessous de la nature et pourra être comparé à un ver faisant des efforts pour égaler un éléphant. Il y a des hommes qui savent imiter les trilles du rossignol, et Kant a dit à ce propos que, dès que nous nous apercevons que c'est un homme qui chante ainsi, et non un rossignol, nous trouvons ce chant insipide. Nous y voyons un simple artifice, non une libre production de la nature ou une oeuvre d'art. Le chant du rossignol nous réjouit naturellement, parce que nous entendons un animal, dans son inconscience naturelle, émettre des sons qui ressemblent à l'expression de sentiments humains. Ce qui nous réjouit donc ici c'est l'imitation de l'humain par la nature. »

HEGEL, L’Esthétique.


ANALYSE

1) Expliquez pourquoi « l’art restera toujours au-dessous de la nature et pourra être comparée à un ver faisant des efforts pour égaler un éléphant ». 

2) Expliquez « simple artifice » et « la libre production de la nature ». Qu’est-ce qui les oppose ?

3) Expliquez « l’imitation de l’humain par la nature ».


SYNTHESE

1) A quelle question répond l’auteur dans ce texte ?

2) Quelles sont les différentes étapes de l’argumentation ?

3) Quelle est la thèse du texte ?


COMMENTAIRE

1) D’après le texte que cherchons-nous vraiment dans l’art ?

2) En vous appuyant sur le texte, vous vous demanderez s’il est possible que l’expression artistique s’émancipe complètement de l’imitation ou si elle doit continuer d’imiter quelque chose, et quoi ?



    Dès lors, ce qui compte n'est pas la perfection de l'imitation. Mais c'est l'expression d'un sujet à travers l'oeuvre d’art. Je fais exister quelque chose qui est nouveau, j’exprime une subjectivité qui était intérieure et se trouve extériorisée. Je projette du subjectif dans de l’objectif, j’extériorise ma conscience.

   En disant qu'on valorise l'expressivité, on valorise surtout la subjectivité. Mais plus précisément encore, on valorise l'effort que fait un artiste de matérialiser son esprit. Il existe peut-être des personnes qui ont des idées d'oeuvres d'art mais elles ne font pas l'effort de les transférer dans le monde réel. Hegel dit alors que la conscience théorique (l'idée d'une peinture, d'une chanson... etc) doit devenir une conscience pratique. Mais ce passage est difficile car c'est confronter quelque chose qui existe pour soi (l'idée) à quelque chose qui existe en dehors de soi et qui n'est pas soi (le monde, c'est-à-dire la matière dans laquelle la chose doit être faite, la peinture, l'instrument de musique, etc.). 

    L'oeuvre d'art qui en résulte témoigne de cet effort de faire apparaître un peu de soi-même dans une matière autre que soi-même. Alors l'oeuvre d'art est un mélange des deux, à la fois extérieure à moi et en même temps parfaitement moi... mais elle incarne alors ma liberté même d'extérioriser ma conscience.


« Les choses de la nature n'existent qu'immédiatement et d'une seule façon, tandis que l'homme, parce qu'il est esprit, a une double existence ; il existe d'une part au même titre que les choses de la nature, mais d'autre part il existe aussi pour soi, il se contemple, se représente à lui-même, se pense et n'est esprit que par cette activité qui constitue un être pour soi. Cette conscience de soi, l'homme l'acquiert de deux manières : primo, théoriquement, parce qu'il doit se pencher sur lui-même pour prendre conscience de tous les mouvements, replis et penchants du coeur humain et d'une façon générale se contempler, se représenter ce que la pensée peut lui assigner comme essence, enfin se reconnaître exclusivement aussi bien dans ce qu'il tire de son propre fond que dans les données qu'il reçoit de l'extérieur. Deuxièmement, l'homme se constitue pour soi par son activité pratique, parce qu'il est poussé à se trouver lui-même, à se reconnaître lui-même dans ce qui lui est donné immédiatement, dans ce qui s'offre à lui extérieurement. Il y parvient en changeant les choses extérieures, qu'il marque du sceau de son intériorité et dans lesquelles il ne retrouve que ses propres déterminations. L'homme agit ainsi, de par sa liberté de sujet, pour ôter au monde extérieur son caractère farouchement étranger et pour ne jouir des choses que parce qu'il y retrouve une forme extérieure de sa propre réalité. ce besoin de modifier les choses extérieures est déjà inscrit dans les premiers penchants de l'enfant ; le petit garçon qui jette des pierres dans le torrent et admire les ronds qui se forment dans l'eau, admire en fait une oeuvre où il bénéficie du spectacle de sa propre activité. »

(Hegel, Esthétique, 1835, La Conscience , I, Aubier, p.55, trad. S. Jankélévitch)


A la suite de Hegel, un artiste, Paul Klee formule l’expressivité comme canon de l’art moderne (l’art moderne est au fond l’art romantique, c’est-à-dire l’extériorisation d’une subjectivité créatrice, qui poursuit le geste naturel). 

L’art est comme un arbre : ses racines (le réel), son tronc (l’artiste) son ramage (les oeuvres). Et comme les branches ne sont pas tenues de ressembler aux racines, les oeuvres ne sont pas tenues d’être figuratives. Ce qui compte c’est que l’artiste crée. Et voici la deuxième citation la plus usée par les terminales en classe de philo : « l’art ne reproduit pas le visible, il rend visible ». Ce à quoi il faut tout de suite ajouter qu’il rend visible la subjectivité de l’artiste, ou le regard de l’artiste sur le monde. 

Les jeux vidéo sont-ils vecteur de cette expressivité ? Peut-on dire que les jeux vidéo sont l’art avec Hegel et Klee ?


    Oui, ils peuvent être de l’art, en tant qu’extériorisation de la conscience de l’artiste. Mais l’artiste travaille souvent en groupe. Alors de quel artiste le jeu pourrait-il être vraiment  l’expression ? Mario est-il plutôt l’expression de Shigeru Miyamoto (level designer de Mario), de Konji Kondo (compositeur de la musique de Mario) ou de Satoru Iwata (le producteur).

Autre problème : le jeu peut laisser une place au joueur. Mais le joueur peut-il véritablement s’exprimer quand tout ce qu’il va pouvoir faire ne sera que l’extériorisation d’une partie de ce que le programmeur a prévu ? Le joueur ne peut pas remettre en cause les règles du jeu, sans quoi, le jeu n’est plus joué. 

Mais la pratique du « run » exploite les bugs d’un jeu pour le finir le plus vite possible fait pourtant plus qu’utiliser les possibilités contenues par le jeu. Le runner découvre des recoins que même les programmeurs ne connaissaient pas. Il détourne les règles. Mais dirait-on que le runner joue sans règles ?

    Il existe aussi des jeux "sand box", des bac à sable, où chacun fait ce qu'il veut avec un ensemble de ressources qu'il peut continuellement améliorer et partager. Minecraft est peut-être le jeu qui permet le mieux cette expressivité. 

 

Un village alsacien reproduit sur Minecraft après 600h de jeu est-il une preuve d'expressivité ?


Ce qui coince, c’est que le jeu vidéo est davantage tourné vers l’action que vers la contemplation. La contemplation peut saisir « l’individualité des choses », dit Bergson, mais l’action ne doit retenir que ce qui est utile, elle rétrécit le réel à une « simplification pratique ». Les jeux vidéo, de par leur nature interactive, et finalement technique (on doit remplir efficacement des objectifs) sont contre-artistiques. Ils sont standards. Ils sont techniques.



II. LES JEUX VIDEO SONT UNE MARCHANDISE COMME LES AUTRES



1. Action contre contemplation.


Bergson donne les critères de ce que serait une vision artistique. Voir le monde en artiste consiste à percevoir « l’individualité des choses » et non plus se borner « à lire les étiquettes collées sur elles ». A ce titre, un artiste est celui qui ne se contente pas d’appliquer des recettes, des règles toutes faites, de réaliser un produit standard, un beau banal. Car aucune originalité ne peut transparaître. Un portrait n’est pas un smiley (même si le premier à avoir dessiné un smiley explique qu’il a refusé de lui faire un sourire à la règle pour donner un côté humain à ce sourire).

« Le beau est toujours bizarre » expliquait Baudelaire, parce que le beau conduit, qu’on le veuille ou non, à voir les choses différemment, hors des étiquettes. Les « étiquettes » sont simplificatrices et impersonnelles car elles recouvrent l’objet et le font disparaître derrière un symbole. D’où la phrase de Bergson :  « Je regarde et je crois voir, j’écoute et je crois entendre, je m’étudie et je crois lire dans le fond de mon cœur. » Regarder c’est voir le monde avec des étiquettes, donc ce n’est pas voir le monde pour ce qu’il est. Ecouter c’est entendre en attendant de reconnaître des formes déjà connues, des sons, des paroles articulées, des formes musicales.

Nous aurions tous pu être artistes, et peut-être sentons-nous même le regret de ne pas l’avoir été, de ne pas avoir développé nos intuitions artistiques. Mais une force plus importante freine cette perception des choses : l’action.


« Vivre consiste à agir » et agir c’est « n’accepter des objets que l’impression utile » et oublier toutes les autres. Par conséquent, agir impose de ne plus voir toutes les choses bizarres, inutiles, qui nous entourent. Nous voyons la porte et nous regardons seulement sa poignée pour savoir comment l’ouvrir. Nous voyons un visage et nous regardons les yeux pour savoir où est dirigée l’attention d’autrui, ou nous regardons sa bouche pour mieux reconnaître ses mots et l’expression de ses affects. 

Dans un jeu vidéo, il y a deux aspects : un jeu et une scène visuelle. La scène visuelle pourrait être contemplée, elle peut même être très riche visuellement. Mais cela suppose que je n’agisse pas. Car si j’agis et que je joue, il faut me concentrer sur les points d’intérêts de cette scène et oublier le reste. Pour le dire simplement, dans un jeu FPS comme Call of Duty, votre seul point d’intérêt est la tête de l’adversaire pour faire le plus de headshots possibles. L’action suppose donc d’abstraire (retirer quelque chose à) nos perceptions.

Le monde du joueur n’est pas le monde de l’artiste distrait qui se laisse porter par l’individualité des choses. Il se meut parmi une « forêt de symboles » (pour citer à la fois Baudelaire et Bergson). 

Que se passe-t-il alors dans l’esprit de celui qui agit ? Il doit sélectionner les bons moyens pour les bonnes fins. Il exerce essentiellement son intelligence. Il possède des outils (une machine qui simule d’autres outils) et il doit mettre en ordre un monde de façon à gagner (que cet ordre consiste à faire disparaître les adversaires, gagner des points ou parvenir au bout du niveau le plus rapidement possible).


Pour Bergson, les créatures intelligentes connaissent un « détachement de la vie ». En envisageant un ensemble de moyens et d’actions possibles, l’humain se perd dans le futur, dans le possible. Le paradoxe est donc que pour agir sur le monde, il faut s’éloigner de lui tel qu’il est ici et maintenant. L’intelligence, en développant la technique (l’adaptation des moyens aux fins) pour maîtriser le monde, ne le perçoit plus qu’à travers ses besoins. L’intelligence ne saisit pas le réel entier. 

En se projetant dans le futur, l’humain affronte deux nouvelles idées qui n’existeraient pas chez des animaux de moindre intelligence : l’échec possible de nos actions, et la fin ultime de nos toutes nos actions, c’est-à-dire la mort. En outre, en envisageant toutes les actions possibles et pas seulement celles utiles à l’espèce humaine, l’humain découvre qu’il peut agir pour lui seul, voire de façon contraire à l’avenir de l’humanité (les bombes nucléaires… les SUV…) et être égoïste.

Le détachement de la vie est donc « la rançon de l’intelligence ». Elle oblige l’humain à inventer des moyens fictifs pour se rattacher à la vie, calmer son inquiétude de l’échec, son angoisse de la mort, et son irrépressible égoïsme. La « fonction fabulatrice » de l’intelligence développe en conséquence des fictions religieuses pour maintenir une relative confiance dans la vie. 

L’intelligence et la technique appellent donc la religion. Car la religion a la charge de nous rattacher à la vie soit par un appel à une intuition directe de la vie (ce que Bergson appelle la religion dynamique), soit par des dogmes construits par l’intelligence (religion statique). 

Une religion statique est définie par au moins trois dogmes : prière qui permet de reprendre le contrôle du monde, immortalité qui permet de transcender sa finitude et communion autour de la figure divine ou totémique. 

Les jeux vidéo produisent un détachement de la vie. Ce qui le trahit est peut-être l’isolement de certains joueurs, mais c’est surtout ce qui dans les jeux eux-mêmes permet de compenser la difficulté inhérente du jeu. Si vous échouez, vous avez le droit à des bonus, qui agissent comme des petites prières. Si vous mourrez, vous avez le droit de recommencer, comme si vous aviez des vies à l’infini. Si vous jouez seul, vous pouvez faire équipe avec d’autres joueurs pour parvenir à résoudre un certain nombre d’obstacles et de difficultés. 

L’argument de l’interactivité du jeu vidéo semble donc se retourner contre le jeu vidéo. En effet, la différence entre une pièce comme Roméo et Juliette est que sa force vient du fait qu’elle est écrite une fois pour toute, et sans doute mieux écrite que nous pourrions nous-mêmes le faire. Mais surtout l’issue finale est irréversible. Vous ne pouvez pas développer une résistance au poison si vous obtenez des artefacts magiques ou assez de points d’expérience en « farmant » dans un donjon. L’art oblige à concevoir un terme aux choses, une forme définitive, ce qui nous oblige à nous confronter à la finitude de notre propre existence plutôt qu’à nous faire espérer à une fausse maîtrise des choses. 



2. Culture contre loisir.


Hannah Arendt écrit au XXe siècle. Pour elle, le fait majeur de ce siècle, outre les guerres et le totalitarisme est l’invention de ce qu’on appelle la culture de masse. 

La formule « panem et circenses » est latine : du pain et du cirque. Elle commente cette formule en disant que le pain sert à vivre, mais que le cirque, c’est-à-dire le spectacle d’animaux ou de combats de gladiateurs, le divertissement en somme est aussi nécessaire à la vie. 

Mais s’ils font tous les deux partie de la vie, cela signifie qu’ils suivent le rythme de la vie : ils sont consommés, usés, détruits par la vie, et il faut recommencer le cycle de nutrition-destruction tous les jours. Ce qui prouve qu’un objet comme les jeux vidéo fait partie de la vie est qu’ils sont jugés sur le critère de leur « fraîcheur et de la nouveauté ». On ne joue plus à des vieux jeux alors qu’on va voir des oeuvres d’art au musée bien qu’elles ne sont plus fraîches ni nouvelles. Mais on va les voir parce qu’elles sont toujours belles, parce que leur existence n’est pas destinées à n’être qu’un produit qu’on consomme. 

L’argument de Hannah Ardendt repose sur une série d’oppositions, un axe d’opposition : d’un côté la consommation, le loisir, le divertissement, les besoins, les masses, le fonctionnel, la vie… de l’autre l’art, la permanence, les siècles la culture…

Les jeux vidéo semblent appartenir à la première catégorie et l’art à la deuxième. Néanmoins la définition de l’art n’est pas très claire sous la plume d’Hannah Ardendt (il est très peu défini, si ce n’est par l’opposition avec la consommation). L’art n’est que ce qui s’oppose à la consommation. On peine à percevoir une définition plus précise de l’art si ce n’est cette définition assez peu satisfaisante que c’est ce qui traverse les siècles, car on sait que beaucoup d’oeuvres ont été détruites ou pourraient l’être, tandis que beaucoup d’autres oeuvres, très mauvaises ont pu être conservées pour des raisons purement symboliques ou politiques (elles sont dans des musées simplement parce qu’elles représentent des périodes de l’histoire).

Qui plus est, il est probable qu’un certain nombre d’oeuvres d’art, même célèbres avait bel et bien une fonction, voire devaient divertir un public. Si on pense encore au théâtre de Shakespeare, ses comédies avaient une fonction divertissante et font appel aux mêmes ressorts scabreux. Quant à ses tragédies, elles contiennent bon nombre de massacres et de meurtre pour satisfaire les goûts morbides du public. En réalité, depuis la naissance de la tragédie, qui mettaient souvent en scène des mythes ou des légendes populaires, un goût pour les meurtres et les situations les plus scabreuses sont très facilement perceptibles. Parricide, inceste, amputation sont monnaie courante… comme elles le sont dans un film d’horreur ou un bon thriller. 

Alors peut-on séparer clairement divertissement et art ?




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